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Le sexe, ça s’apprend

Le sexe, tout le monde en parle ! Les moyens d’information ne
manquent pas et les médias regorgent d’articles et de reportages
sur des sujets "coquins". Pourtant nos connaissances reposent
souvent sur des idées toutes faites, qui peuvent mettre en péril
notre vie amoureuse ! Philippe Brenot, psychiatre et anthropologue,
enseigne la sexologie à l’université de Paris V René Descartes. Il
décrypte dans son ouvrage "Le sexe et l’Amour", nombre d’entre
elles.
Votre livre est un véritable manuel d’éducation sexuelle pour adultes. Les
idées reçues sont donc encore nombreuses ?

Philippe Brenot : Le premier grand mythe c’est de penser que "le sexe
c’est naturel". C’est avec un tel discours que l’on a longtemps refusé de
faire de l’éducation sexuelle puisqu’il n’était pas utile de comprendre les
mécanismes. En réalité, le sexe est culturel, il est le fruit d’un
apprentissage. Si les idées reçues ne manquent pas, c’est que nos
connaissances sont encore lacunaires. Nous pouvons ainsi décrire la
sexualité des femmes, mais ses mécanismes demeurent largement
inconnus. Le fonctionnement de l’érection était quant à lui ignoré il y a
moins de dix ans. Notre compréhension du phénomène a progressé
avec la découverte par hasard de produits qui avaient de l’effet.

Banalisation de l’adultère, échangisme, voyeurisme, la levée de ces
tabous semblent profiter essentiellement aux hommes. Qu’en est-il
réellement ?

Philippe Brenot : Toute pratique sexuelle entre deux adultes est libre
dans la mesure où il n’y a pas de contraintes. L’adultère dépend de sa
morale personnelle. Des couples affirment ne pas en être gênés, même
si je suis personnellement réservé sur les conséquences à long terme
pour l’équilibre de leur relation. L’échangisme, voire le mélangisme qui
implique plus de deux personnes, introduit (outre la relation avec un
autre partenaire) le voyeurisme et l’exhibitionnisme puisque l’acte est
pratiqué en présence de l’autre. La femme est alors échangée au sens
propre du terme. Dans un cas comme dans l’autre, je ne crois pas qu’un
couple en sorte indemne si la pratique devient habituelle. La notion de
perversité pour des comportements sexuels a disparu en elle-même
mais il existe toujours des personnalités perverses. Elles s’inscrivent
dans une compulsion de répétition et manipulent le partenaire pour lui
imposer des contraintes. Le désir de l’autre n’est plus respecté

Le discours commun insiste beaucoup sur le plaisir. Certaines
personnes ne risquent-elles pas de se trouver marginalisées par cette
"pensée unique" ?

Philippe Brenot : La tyrannie du plaisir existe, c’est évident. Elle
s’exprime en particulier dans les magazines féminins qui dressent une
image faussée de la sexualité. Tout le monde est censé jouir sans
problème. Ces médias imposent une surreprésentation des minorités
alors que le transsexualisme, la bisexualité concernent finalement peu
de monde.

Cette vision est celle d’un petit groupe parisianiste dans lequel gravitent
les comités de rédaction. Le sexe est toujours abordé sous un aspect
ludique et sert de prétexte à l’amusement, mais il est rare que l’on parle
sérieusement de sexe à la télévision. La radio propose davantage
d’émissions dans lesquelles des problèmes sont évoqués et où les
personnes sont réellement écoutées.

Dans ce contexte quel est le secret d’un couple qui dure ? La
construction d’une relation sur le long terme est un exercice difficile.

Philippe Brenot : Au Moyen-Age, la durée de vie des couples était de
13 ans, et de 25 ans au XIXe siècle. Aujourd’hui, un couple qui se forme
vers 20 ans peut vivre jusqu’à 60 ans ensemble. Il s’agit donc d’un
phénomène récent. Or sur une durée aussi longue, plusieurs tranches de
vie se succèdent. Chacun gagne en maturité à son rythme qui peut être
différent, l’homme souhaite par exemple souvent acquérir une plus
grande liberté. Le secret des couples qui durent réside dans la capacité
des conjoints à inventer des couples successifs et à entretenir un
érotisme, c’est-à-dire une tension du désir de l’un pour l’autre. Faute d’y
parvenir les partenaires constitueront de nouveaux couples pour se
renouveler. Mais la plupart des personnes n’ont pas envie de vivre des
séparations.

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